Le salon funéraire constitue un espace dédié à l’expression de la souffrance. Les membres de la famille et les proches s’y rassemblent pour se soutenir les uns les autres. L’amour et la chaleur que l’on reçoit de ses proches sont salvateurs. Il est d’ailleurs important d’encourager chacun à laisser aller ses sentiments en lui assurant notre soutien. Nombre de familles préfèrent garder le cercueil fermé parce qu’elles redoutent la crise de larmes. Pourtant, cela ne constitue aucunement un manque de contrôle de soi ni un manque aux règles de civilité.
L’absence du corps
Lorsque la dépouille est absente, une photo du défunt affichant un vivant sourire est parfois placée à l’orée du cercueil. Les signes de la mort sont alors occultés. Il n’est plus possible de constater le décès d’un proche. De plus, l’absence de la dépouille empêche souvent l’expression de l’affliction.
L’expérience montre qu’il est primordial de se réunir rituellement autour de la dépouille du défunt. L’exposition de la dépouille, cela a maintes fois été souligné, a un effet libérateur sur les émotions. Le fait de voir le corps sans vie d’un être cher déclenche de fortes émotions qui doivent être immédiatement relâchées. Dans le cadre du salon funéraire, chacun a l’assurance du soutien des uns et des autres en cas de défaillance. Un réseau de solidarité se forme spontanément pour l’occasion.
Pour exprimer sa douleur
N’oublions pas que l’un des buts du rite funéraire est de permettre l’expression régulée de la souffrance. En cas de déversement excessif de l’affliction, des proches seront en mesure de contrôler la situation. Il est donc préférable que les émotions les plus vives s’expriment par un torrent de pleurs, même si cela déroge à notre état de civilisé. On sait que le refoulement de la souffrance ne pourrait qu’alourdir et prolonger le processus du deuil. En fait, la présence de la dépouille aide vraiment à accepter la réalité du décès, à libérer la souffrance et à retrouver le goût de vivre.
En somme, il est préférable pour toutes les personnes touchées par un décès de libérer leur souffrance à l’occasion du rite funéraire. Il ne faut pas attendre de se retrouver seul pour laisser exploser ses larmes. Qui alors nous consolerait ?
Denis Jeffrey, professeur