L’an dernier au Québec, 427 personnes bénéficiaient d’une transplantation d’organes qui leur sauvait la vie ou en améliorait grandement la qualité. Ces miracles sont rendus possibles grâce à des gens ordinaires qui font le choix de poursuivre la chaîne de vie, au-delà de leur mort. Signer sa carte de don d’organes, c’est dire oui à la vie. Mais c’est surtout offrir, à des personnes malades, une chance ultime de renaître.
En 1983, Diane Hébert est la jeune maman d’une fillette de trois ans. Se sentant de plus en plus fatiguée, elle consulte son médecin qui lui annonce la terrible nouvelle : une embolie non décelée lors de son accouchement a dégénéré en une hypertension pulmonaire. Pour espérer voir grandir sa fille, elle n’a d’autre solution que de recevoir un nouveau cœur et de nouveaux poumons.
Ce n’est que deux ans plus tard, alors que son état s’est grandement détérioré, qu’un donneur compatible est trouvé. La transplantation peut avoir lieu. Après plusieurs complications et un mois d’inconscience, durant lequel elle est victime de trois arrêts cardiaques, Diane Hébert se réveille enfin. Elle voit et entend à peine, ne peut plus parler et ses jambes sont paralysées. Mais elle vit !
Un an plus tard, grâce à des traitements soutenus et à sa grande détermination, elle recouvre la vue, l’ouïe, l’usage de la parole et de ses jambes. Son combat pour la vie est gagné; elle peut enfin retourner dans sa famille. Reconnaissante, elle promet de trouver un moyen concret de sensibiliser la population au don d’organes.
Une promesse tenue
Diane Hébert tient sa promesse : dès 1987, suite à ses démarches, la carte d’assurance-maladie devient la carte officielle du don d’organe. Elle rassemble ensuite une équipe, crée une fondation qui porte son nom et y préside le conseil d’administration. Et c’est de cette façon que s’exprime, année après année, sa gratitude d’être en vie.
À la direction de cet organisme, Isabelle Gendron déploie, avec son équipe, toutes ses énergies à aider les Québécois greffés ou en attente d’une greffe à traverser les étapes de ce processus. La Fondation Diane Hébert offre aux greffés des équipements médicaux, un service d’hébergement ainsi qu’un appui moral constant dans cette longue traversée vers leur nouvelle vie.
Isabelle Gendron travaille aussi activement à sensibiliser la population à l’importance de signer sa carte de don d’organes et, surtout, à celle de parler de sa décision à ses proches.
Que votre volonté soit faite
Si vous désirez faire don de vos organes à votre décès, les étapes sont simples mais très importantes.
- D’abord, signez l’autocollant que la Régie de l’assurance-maladie du Québec vous a fait parvenir lors du renouvellement de votre carte. Si vous lui en faites la demande, la Fondation Diane Hébert se fera un plaisir de vous faire parvenir gratuitement cet autocollant.
- Aussi, prenez le temps d’informer votre famille de votre décision. Lors de votre décès, ce sont vos plus proches parents qui auront à autoriser le don de vos organes. Aucun prélèvement n’est possible sans l’autorisation de la famille.
- Veillez à cocher OUI à l’endos de votre carte et à garder celle-ci sur vous en tout temps.
Si vous changez d’idée, vous n’avez qu’à retirer l’autocollant de votre carte d’assurance-maladie et, surtout, à en informer votre famille.
Donner un sens à la douleur
Il est extrêmement difficile de perdre un être cher, surtout lorsque la mort survient dans des circonstances tragiques et soudaines. Le choc est grand et la douleur accablante. C’est dans ces moments de grande tristesse que la proche famille doit donner son consentement au prélèvement des organes du défunt. Cette décision doit être prise rapidement, et, il va sans dire, dans une situation où l’émotion est à son comble. Si le donneur a avisé sa famille de sa volonté de léguer ses organes, la décision de la famille s’en trouve grandement facilitée.
Les familles des donneurs se sentent souvent réconfortées de savoir qu’elles ont ainsi contribué à sauver ou à améliorer grandement la vie d’autres personnes. Ce geste peut aider les endeuillés à trouver un sens à leur douleur.
C’est grâce à ces familles éprouvées, qui trouvent la générosité d’offrir les organes de l’être aimé, que de merveilleuses renaissances sont possibles.
En mémoire aux défunts
Chaque année, l’Association canadienne des dons d’organes (ACDO) organise une cérémonie rendant hommage à ces maillons de la chaîne de la vie que sont les donneurs d’organes. Cette cérémonie rassemble les familles des donneurs et celles des greffés ainsi que des gens venus donner leur appui à la cause.
Cette année, lors de cette touchante cérémonie, les familles de 182 donneurs ont reçu une médaille sur laquelle était gravé le titre d’ambassadeur de la santé.
Des événements comme celui-ci sont importants pour la Fondation Diane Hébert et pour Isabelle Gendron qui s’est beaucoup impliquée dans sa promotion : « C’est merveilleux de pouvoir remercier les familles des donneurs et de rappeler les défunts à notre mémoire. Et c’est aussi une belle façon de démontrer à la population que le don d’organes, ça sauve des vies. »
La chaîne de la vie
- La santé des organes d’un donneur prévaut sur l’âge de celui-ci. Il existe des donneurs de 60, 70 et même de 80 ans. Même si l’âge moyen du donneur est de 34 à 38 ans, on a vu une dame de 108 ans léguer ses yeux! Chez un donneur de plus de 65 ans, l’organe qui vieillit le moins rapidement est le foie. (1)
- L’an dernier, près de 83 % des Québécois se disaient en accord avec le don d’organes. Seulement 59 % d’entre eux avaient pris les dispositions nécessaires au prélèvement de leurs organes et 59,6 % en avaient avisé leur famille. (2)
- 96 % des proches d’un donneur consentiraient au don d’organes s’ils étaient informés au préalable des volontés du donneur, contre 58 % seulement lorsque la famille n’a pas discuté de la question. (3)
Des réponses à quelques questions
- Le prélèvement d’organes ou de tissus n’entraînera aucuns frais supplémentaires pour la famille. Ce n’est pas non plus une entrave aux obsèques. Après l’intervention, le corps est remis au thanatologue et, selon les volontés exprimées, il pourra être exposé.
- La religion catholique n’émet aucune réserve quant au don d’organes. Au contraire, elle le voit comme un geste de générosité.
Pour faire un don ou pour toute demande d’information relative au don d’organes, voici l’adresse de la Fondation :
La Fondation Diane Hébert
132, Blainville Est
Ste-Thérèse-de-Blainville (Québec) J7E 1M2
Tél. : (450) 971-1112 / Fax : (450) 971-1818
Ligne sans frais : 1-877-971-1110
Courriel : [email protected]
Le plus beau des cadeaux
24 avril 1983, nous sommes dimanche après-midi, dehors le temps est à la pluie. L’air a un goût de cidre. J’ai 21 ans aujourd’hui et je viens de recevoir le plus beau cadeau d’anniversaire dont je puisse rêver : un cœur.
Mon premier cœur, lui, il a flanché sous le coup d’une fracassante et impardonnable cardiomyopathie virale. « Cardiomyopathie », c’est un mot imposant, un mot long de 15 lettres, c’est un mot fatal. Il n’y a aucune issue, aucune sortie, c’est le labyrinthe de la mort. Et voilà que tout mon destin bascule. Mes cardiologues traitants m’informent que je suis la candidate idéale pour reprendre le programme de greffe cardiaque, abandonné quelques années auparavant suite au décès de tous les patients. Grâce à la cyclosporine, médicament miracle qui a déjà fait ses preuves aux États-Unis, on recommencera les transplantations d’organes. Le hic, c’est que nous sommes en 1983 et que les dons d’organes appartiennent encore à la science-fiction. Je ne sais par quel miracle j’ai eu mon cœur si vite. Mille mercis à ces parents qui, malgré la peine et le déchirement, ont consenti à donner les organes de leur fils bien-aimé.
Par la suite, j’ai dû apprendre à vivre avec les effets secondaires des médicaments, mais c’est payer bien peu cher pour renaître. En décembre 1988, j’ai reçu un autre merveilleux cadeau : un rein. Les miens ont été intoxiqués par la cyclosporine. Pas de panique, c’est de plus en plus rare. Grâce à l’expertise acquise au fil des ans, il est plus facile de doser adéquatement le médicament, tout en évitant de causer des dommages aux reins. Et, finalement, en 1993, j’ai reçu un autre précieux cœur. J’ai perdu le premier suite à l’artériosclérose, un autre bien grand mot.
Je vous ai épargné les détails de ma vie, mais je vous ai présenté avec fierté et gratitude les trois importants piliers de ma renaissance. Puissent-ils m’appartenir encore longtemps avec l’aide de merveilleux médecins, de ma famille et de tous les gens qui, comme mes précieux donneurs, démontrent une ouverture d’esprit et une grandeur d’âme, en donnant les organes de leurs êtres chers.
C’est à eux que revient tout le mérite.
En mon nom et au nom de toutes les personnes greffées et en attente de greffe : Merci.
Diane Larose
Greffée d’un cœur en 1983, d’un rein en 1988 et d’un cœur en 1993
1. Statistiques de Québec-Transplant
2. Sondage effectué par la firme Léger et Léger, en avril 1999
3. Rapport du comité permanent de la santé, avril 1999