Une industrie qui s'adapte au temps

L'industrie funéraire est une des seules industries québécoises qui peut regarder les 50 prochaines années avec la certitude de toujours faire des affaires. Non seulement y aura-t-il toujours des morts, mais en dépit des prouesses médicales qui repoussent le trépas toujours un peu plus loin, ces morts seront toujours plus nombreux, augmentation démographique oblige.

L'industrie funéraire ne dépend pas des soubresauts économiques et autres conjonctures mondiales. Statistiques à l'appui, si nous avions en moyenne, au Québec, entre 30 000 et 40 000 décès par année entre 1900 et 1970, il y en avait 53 000 entre 1960 et 2000, atteignant un record en 2008 avec 56 800 décès. L'Institut de la statistique du Québec prévoit qu'en 2040, le Québec perdra 100 000 citoyens et que le point culminant du nombre de décès sera atteint en 2060. Bien des industries voudraient avoir de tels horizons.

Au Québec, l'industrie funéraire est divisée en trois grands groupes : les entreprises familiales indépendantes (55 à 70 % du marché), les grands groupes privés, dont des multinationales américaines (15 à 25 % du marché) et les coopératives funéraires (15 à 20 % du marché). Depuis la fin 2012, un autre joueur s'est démarqué : le Groupe Athos – des intérêts québécois – a racheté de grosses maisons funéraires qui ont appartenu dans le passé à des multinationales américaines et canadiennes, comme Urgel-Bourgie à Montréal, et Lépine-Cloutier à Québec. L'échiquier bouge.

«L'industrie funéraire est un secteur qui n'a pas encore été totalement consolidé [rattaché à quelques grandes chaînes]», relate Alain Leclerc, directeur général de la Fédération des coopératives funéraires du Québec. «Mais il va y avoir une consolidation dans les prochaines années», prévoit-il.

«Le Groupe Athos développera un réseau dans les principales villes du Québec», mentionne Donald Veilleux, directeur du marketing du Groupe Athos. «Les prochaines seront Laval, Sherbrooke, Trois-Rivières...», précise-t-il. Selon ce dernier, la présence du Groupe Athos répond à un besoin : «La relève n'est pas toujours là pour les entreprises familiales, et faire partie d'un groupe est une force, on peut les accompagner dans leurs opérations quotidiennes et les racheter éventuellement», affirme M. Veilleux. Du coup, les Américains perdent du terrain. D'ailleurs, l'arrivée de ce groupe aux intérêts québécois «est un moindre mal», pour reprendre les mots d'Alain Leclerc. Le Groupe Athos et les coopératives sont de sains concurrents.

Selon la Corporation des thanatologues du Québec, il y a 280 permis de salons funéraires délivrés au Québec, dont une vingtaine dans la région de Québec. Cette industrie a recours aux services de quelque 6000 employés, dont 700 dans les coopératives. Cela va du thanatopracteur (la seule personne qui doit, selon la loi, avoir une formation technique) au thanatologue (à qui est délivré le permis), en passant par les conseillers aux familles ou en préarrangements, les porteurs, les hôtesses, le personnel d'entretien.

Texte : Sophie Gall
Photo : Yvan Doublet
Publié dans Le Soleil

Lire le dossier sur les arrangements funéraires publié par Le Soleil.

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