L'impact réel des coopératives funéraires

Saviez-vous que dans les années 70, les Québécois étaient ceux qui payaient le plus cher pour leurs funérailles au Canada? Selon une étude du Gouvernement du Québec*, en 1972, il en coûtait en moyenne 794 $ pour des funérailles au Québec comparativement à 665 $ pour le Canadien moyen. Quinze ans plus tard, les Québécois étaient maintenant choyés face aux Canadiens et payaient leurs funérailles en dessous de la moyenne canadienne, soit 2 593 $ comparativement à 2 849 $. Comment expliquer ce revirement de situation?

Toujours selon la même étude, « Le coût relatif des funérailles au Québec n’a cessé de décroître grâce à l’arrivée des coopératives funéraires ». Il faut savoir que la première coopérative funéraire fut fondée en 1942, mais qu’il n’en existait que 3 à l’aube des années 70. C’est bien peu pour avoir une influence sur ce secteur d’activité. Les années 70 furent toutefois prolifiques pour le mouvement avec la création de 16 coopératives funéraires. Sept s’ajoutèrent dans les années 80.

C’est ainsi qu’en 1989, le Québec comptait près d’une trentaine de coopératives funéraires, suffisamment pour offrir des services dans toutes les régions et influencer le prix des funérailles partout au Québec. Selon le gouvernement du Québec, « L’arrivée des coopératives funéraires dans plusieurs régions a eu pour effet de briser plusieurs monopoles ou quasi-monopoles d’entreprises funéraires privées et, par conséquent, de faire baisser le coût moyen des funérailles ».

Ainsi, face aux 2849 $ payés en moyenne au Canada en 1987 et aux 2 593 $ payés par les Québécois, les utilisateurs des services des coopératives funéraires ne payaient que 1 812 $, soit 63 % de la moyenne canadienne. En plus du prix, les coopératives funéraires ont de l’influence sur plusieurs aspects de l’industrie. Nous avons participé activement en 1988 à l’adoption de la Loi sur les arrangements préalables qui interdit désormais la sollicitation de porte-à-porte dans la vente d’arrangements préalables.

Grâce à une coalition formée autour des associations coopératives d’économie familiale (ACEF), nous avons pu enrayer les abus et avons aussi contraint les entreprises funéraires à déposer en fiducie les sommes perçues pour la délivrance future des funérailles.

David contre Goliath

Dans les années 90, nous avons combattu l’arrivée des multinationales américaines dans le paysage funéraire québécois. Imaginez! En l’espace de moins de 5 ans, ces multinationales se sont emparées de 40 % de l’industrie funéraire québécoise.

Avec l’aide du Gouvernement du Québec et du mouvement Desjardins, nous avons mis sur pied un fonds de défense visant à maintenir entre nos mains les entreprises funéraires à vendre. Par l’entremise de ce fonds, nous avons acquis une quinzaine d’entreprises funéraires, pour des investissements de plus de 28 millions de dollars.

Aujourd’hui, les entreprises américaines ont perdu du terrain et les coopératives funéraires sont maintenant le principal réseau d’entreprises funéraires au Québec. Près de 250 000 personnes sont propriétaires de l’une ou l’autre des coopératives funéraires implantées dans toutes les régions, et un Québécois sur 5 choisit de confier les funérailles d’un proche à une de nos coopératives.

Voilà tout le chemin parcouru par un petit groupe d’idéalistes qui croyaient que la mort ne devait pas être une « business » et qu’il fallait mettre un terme à l’exploitation du chagrin.

 

Alain Leclerc
Directeur général Fédération des coopératives funéraires du Québec

*Profil des coopératives funéraires de 1985 à 1989. Ministère de l’Industrie, du Commerce et de la Technologie, 1991

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